Le bleu est une couleur chaude de Julie Marot

14:00

A la fin de l'année 2013 est sorti au cinéma un film qui a fait beaucoup de bruit : "La vie d'Adèle" réalisé par Abdellatif Kechiche. Beaucoup de polémiques ont tourné autour de ce film à cause des conditions de tournage difficiles, des scènes de sexe simulées ou non, ou des équipes technique malmenées durant toute la production de ce film qui aura récolté pas moins que la Palme d'Or au Festival de Cannes (et beaucoup d'autres récompenses à l'étranger). 
Quand un film fait autant de bruit comme celui-là, je ne peux m'empêcher de le regarder par pure curiosité et aussi un certain intérêt cinéphile. Ce film a été pour moi un calvaire. Trois heures de vide, de scènes sexuelles trash, vulgaires et beaucoup trop graphiques à mon goût, une réalisation très moyenne, une suprématie de gros plans qui m'a vite étouffée, un jeu d'acteur qui m'a laissé de marbre, un message faussement social et un scénario qui n'aboutit finalement à pas grand chose. Bref, une très grande déception. 

Si je vous parle de tout ça c'est parce qu'il n'y a pas longtemps, au travail, une de mes collègues et amie (qui est fan du film) me disait avoir le roman graphique qui l'a inspiré mais ne l'avait toujours pas lu. Comme ce n'était pas dans ses priorités je lui ai gentiment demandé de me le prêter pour que je puisse faire le comparatif oeuvre d'origine/adaptation comme j'aime le faire. C'est comme ça que je me suis retrouvée en possession du "Bleu est une couleur chaude" de Julie Maroh. 



De quoi ça parle ?


Clémentine est au lycée dans une classe littéraire. Elle mène une vie tout à fait ordinaire jusqu'au jour où elle croise en ville une fille aux cheveux bleus. Ces quelques secondes la marqueront à jamais. 







Quand mon amie m'a prêté sa bande dessinée (ou roman graphique mais je vois pas tellement la différence), j'étais encore dans ma lecture de "L'Histoire sans Fin". Mais comme cela s'annonçait être un court moment de littérature, j'ai délaissé mon livre un soir après le boulot pour me concentrer sur cette BD. Et grand bien m'en a pris ! 

J'ai ADORÉ cette BD, pour beaucoup d'aspects. Déjà pour commencer, les graphismes sont juste magnifiques ! Certaines cases étaient tellement belle que je suis restée plusieurs secondes à les regardes. Le dessin est fin, l'utilisation des couleur est judicieuse, bref j'aime énormément le style graphique très agréable, très doux aux yeux. 

Pour ce qui est de l'histoire, j'ai enfin vu une véritable romance amoureuse par rapport à ce que l'adaptation peut montrer. Les personnages m'ont énormément touchées, j'ai trouvé le récit très sensible, sincère, très pudique. Si dans le film j'avais trouvé les scènes de sexe trash et directes, elles sont ici empreintes de désir et d'érotisme (et elles ne durent pas une éternité au point de rendre mal à l'aise !). L'écriture est douce, certaines phrases me sont restée en tête. J'ai véritablement vu une très belle histoire d'amour naître page après page, un vrai discours amoureux et une très belle description de tout ce qui se rapporte aux fantasmes adolescents et comment ceux-ci nous construisent en tant qu'adulte. 

La trame narrative est beaucoup mieux construite que celle du film. J'ai toutefois un petit bémol concernant la fin qui vient beaucoup trop vite à mon goût. Même si elle est annoncée dès les premières cases, elle n'occupe finalement que très peu de pages dans la dernière partie de la BD. Tout vient très vite sans que rien ne nous y prépare finalement. Et cette fin, mais quelle fin ! Tellement plus significative, tellement plus forte en émotions, tellement pleine de sens que je me demande pourquoi elle n'a pas été gardé pour l'adaptation. C'est une fin triste mais qui a une certaine beauté en soi. 

Autre petit bémol qui m'empêche d'avoir le coup de coeur c'est le message de tolérance diffus tout au long de la BD. Alors je ne dis pas que c'est pas bien, parce qu'évidemment les relations homosexuelles sont encore difficilement acceptées par beaucoup. Mais je pense parce que faire passer des messages par les BD soient le meilleur lieu. 
Enfin je veux dire, si je lis cette BD c'est que je sais déjà ce que je vais y trouver, j'ai déjà une certaine ouverture d'esprit de par mon éducation ou mes rencontres qui fait que je ne vais pas être scandalisée par ce que je vais trouver en ouvrant le livre. Mais par contre je vois mal Christine Boutin acheter la BD de Julie Maroh. Lire cette BD est déjà un acte de tolérance et d'acceptation ou d'ouvrerture d'esprit, le message alors délivré par toute la BD n'est peut être que redondant pour le lecteur car il ne sent peut alors pas concerné par celui-ci. 
Par contre j'ai énormément aimé la différence que le personnage de Clémentine fait entre l'homosexualité (ou n'importe quelle relation amoureuse d'ailleurs) comme affaire intime ou affaire publique qui la différencie du personnage d'Emma, qui est beaucoup plus militante. Cette différence entre ces deux personnages est beaucoup plus porteuse de sens comme certaines phrases toutes faites telles que "moi je m'en fiche de ce que font les gens chez eux, chacun fait ce qu'il veut" qui est finalement beaucoup plus creux et surfait, presque infantilisant et indigne de tout le reste de la BD. 


En bref :

Une lecture qui a du me prendre une heure mais qui m'a beaucoup plus apportée que trois heures de film. Beaucoup plus de profondeur. Des dessins magnifiques et une histoire si touchante que j'en avais des frissons à la toute fin. Si la critique sociale n'était pas aussi présente pour laisser place à un récit plus intimiste ça aurait été un véritable coup de coeur pour moi ! 

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1 commentaires

  1. Merci pour ton article qui exprime bien mes sentiments après avoir lu cette BD.
    Je l'avais lue bien avant la sortie du film et je l'avais adorée ! Je trouvais les graphismes excellents, plein d'émotions, pertinents. La trame textuelle était également bien choisie et émouvante. C'est une BD qui m'a beaucoup touchée et je n'ai jamais vu le film par peur d'être déçu. Un jour, je le regarderai par curiosité, car, comme tu le fais remarquer, la Palme d'or et les critiques attisent cette dernière !

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